L’Art sacré 2
« Je préfère des génies sans foi que des chrétiens sans talent». (Marie-Alain Couturier, o.p.)
Une telle déclaration avait le mérite de la radicalité ! Elle vaut toujours en 2016 comme dans sa prime jeunesse. Elle est, bien sûr, excessive, mais tellement significative car le défi réside plus que jamais dans cette audace.
Le religieux qui fait retour, paraît-il, pour certain, aujourd’hui, se fait une gloire d’être hors sol, hors culture, sans culture, sans racine, donc pas si radical que cela, pour mieux abuser dans un si pitoyable trompe-l’oeil, « les idiots utiles » ou, plus simplement, les naïfs authentiques qui aimeraient tant croire en quelque chose ou quelqu’un de pertinent car tous les idéaux et supports d’autrefois se sont dérobés sous nos pieds, lorsque nous avons vidé le ciel.
La politique désenchante. La religion désenchante. Les médias nous l’assurent tous les jours, comme ils nous assurent le retour, non seulement du religieux confondu avec l’irrationnel fanatique, mais aussi et surtout le retour des anciens spectres de l’ordre théologico-politique. Plus que jamais, comme le disait Dostoïevski, et comme le montrait Fra Angelico, «la beauté sauvera le monde», celle des patrimoines comme celle des vies et visages que L’Art sacré 2 voudrait envisager : donner accès à la culture dans la double et conjointe dimension de protection et de promotion et, ainsi, donner accès à la culture comme antichambre et épiphanie du divin qui en elle prend chair.
Ré-enchanter serait tâche impossible? Oui, sûrement, comme gouverner, éduquer, ou psychanalyser! Raison de plus pour ne rien lâcher car baisser les bras à l’heure de transmettre le meilleur et le pire des démissions. Baisser les bras à l’heure des caricatures du religieux et la pire couardise que nous pourrions produire pour répondre au monstre dévisagé et dévisageant qui étouffe un peu partout dans le monde les rires de l’enfance.
Patiemment, modestement, L’Art sacré 2 voulait envisager, doté d’une clarté nouvelle, le visage de la Vierge et de l’enfant que la lumière de l’Incarnation délicatement chatoie. Si seulement nous pouvions faire apparaître de belle et nouvelle manière la mesure dans mesure de la tendresse que Marie et Jésus échangeaient.
Pas d’idéologie, pas de conquête, et aucune assurance de résultat car heureusement et gracieusement pas d’évaluation si ce n’est celle qui vient toucher ou piquer les coeurs de la componction qui les brise. Pas de codes préétablis non plus pour miser sur l’initiative, celle qui vient de l’homme agissant de cette liberté issue de Dieu car l’Eternel n’a pas besoin de clones, car Dieu croit en l’homme en qui Il a placé Ses capacités: point de marionnettes, mais des femmes et des hommes capables du Beau mis au service du peuple qui à travers lui forge et reforge sans cesse son histoire et le témoignage de son génie.
Père Laurent Lemoine, o.p
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