Message du Cardinal Leonardo Sandri, Préfet de la Congrégation pour les Eglises Orientales, pour l’Exposition « Grandes Heures des manuscrits irakiens », Eglise de Santa Maria Sopra Minerva, Rome, 9 June 2017
Je suis très heureux de pouvoir vous adresser un salut à l’occasion de l’ouverture de l’exposition « Grandes Heures des manuscrits irakiens », qui donnera la possibilité de voir la précieuse et séculaire hérédité qui nous arrive de cette terre si éprouvée qu’est l’Irak. J’ai eu l’occasion et l’honneur de la visiter quand elle était exposée à Paris, voilà deux ans en mai, et je me réjouis qu’elle puisse être connue et appréciée maintenant à Rome.
Je salue Son Excellence Mgr Bruguès, Archiviste et Bibliothécaire de la Sainte Eglise Romaine, l’Ambassadeur de France près le Saint-Siège, S. E. Philippe Zeller, le Prieur du Couvent de Santa Maria Sopra Minerva, ainsi que toutes les personnes présentes.
Nous confions le succès de cette exposition au saint qu’aujourd’hui, la liturgie latine commémore: Saint Ephrem le Syrien, surnommé “ la lyre du Saint-Esprit”, que le Pape Benoit XV a proclamé Docteur de l’Eglise en 1920, accueillant ainsi la requête des Patriarches Syro-cath olique, maronite et chaldéen de l’époque. A cette occasion, le Saint-Père rappelait la définition de Saint Ephrem qu’en faisait Saint Grégoire de Nysse. Il le comparait à l’Euphrate parce que “ irriguée par ses eaux, la multitude des chrétiens a produit au centuple le fruit de la foi”. C’est une affirmation qui conduit à l’Irak, d’où ces manuscrits, qui sont exposés ici, ont été mis à l’abri. Elle en évoque la beauté du paysage ainsi que la richesse de foi et de tradition qui y sont conservées. Alors que nous affirmons cela, nous sentons monter en nous deux pensées: d’un côté, la souffrance et la nostalgie parce que nous avons tous sous les yeux et dans le cœur, les terribles scènes de dévastation consécutives à des années de guerre et de terrorisme qui ont défiguré la face de ce peuple, contraint à fuir des paysages et des tésors de la culture chrétienne et non chrétienne ; d’un autre coté, nous voulons être remplis de l’espérance qu’un nouveau commencement, qu’un retour à la maison, qu’une nouvelle aube de lumière irradié par l’Evangile et par la beauté qui a été capable de se diffuser dans les œuvres de charité, mais aussi dans la culture, dans la littérature et dans l’art, sont possibles.
Ma pensée va surtout à ses fils et ses filles qui continuent à vivre et à témoigner de la foi dans le Christ Ressuscité, et s’étend à ceux qui, dans le passé et aujourd’hui encore, ont été accueillis dans les pays de la diaspora: tout le monde peut contempler dans les manuscrits exposés le trésor conservé et transmis de génération en génération. Ce sont les documents de la foi qui ont rendu possibles les célébrations liturgiques, l’étude de la Bible et l’approfondissement des autres matières à nos frères et sœurs qui ont vécus autrefois.
Il faut rappeler que ces manuscrits ont été réalisés et gardés là où la communauté chrétienne était une minorité dans le pays, mais il lui était accordé la possibilité d’apporter sa contribution à l’édification du bien commun, en développant toutes les expressions de sa culture : l’art, la musique, la littérature, la science…
Le souvenir d’un passé de liberté et de témoignage transforme le désir de stabilité qui habite le présent en une supplique affligée afin que le Seigneur touche les cœurs violents et accorde la paix tant désirée.
Si certains détruisent, nous devons rendre hommage à qui, prophétiquement, a choisi d’habiter l’Irak, en s’immergeant dans la vie et construisant des liens féconds avec l’Occident dans le plein respect de la particularité des traditions et des rites orientaux. Ma gratitude s’adresse à l’Ordre des Prêcheurs, grâce auxquels de nombreux manuscrits exposés ici, ont pu être sauvés de la destruction et je suis très heureux que cette exposition face partie des manifestations prévues pour le huitième centenaire de la fondation de la famille religieuse de Saint Dominique.
Pour finir, je souhaite rappeler un dernier événement : le 1er mai de cette année, nous avons célébré le Centenaire de la Congregation pour les Eglises Orientales, créée par le Pape Benoit XV par le Motu Proprio Dei Providentis. Durant ces cent ans, nous avons assisté, malheureusement, à tant d’épisodes de souffrances et de persécutions, mais aussi à tant de pages lumineuses de charité, de témoignage de l’Evangile, de collaboration œcuménique et interreligieuse. Qu’ils nous aident à conserver cette inestimable hérédité selon les paroles du Saint Pape Jean-Paul II dans la Lettre Apostolique Orientale Lumen :
« …puisque nous croyons que la vénérable et antique tradition des Églises orientales constitue une partie intégrante du patrimoine de l’Église du Christ, la première nécessité pour les catholiques consiste à la connaître pour pouvoir s’en nourrir et favoriser, selon les moyens de chacun, le processus de l’unité. Nos frères catholiques orientaux sont tout à fait conscients d’être les porteurs vivants, avec nos frères orthodoxes, de cette tradition. Il est nécessaire que les fils de l’Église catholique de tradition latine puissent eux aussi connaître ce trésor dans sa plénitude et ressentir ainsi avec le Pape le vif désir que soit rendue à l’Église et au monde la pleine manifestation de la catholicité de l’Église, exprimée non par une seule tradition, ni encore moins par une communauté opposée à l’autre, et que nous puissions, nous aussi, apprécier pleinement ce patrimoine indivis de l’Église universelle révélé par Dieu qui se conserve et croît dans la vie des Églises d’Orient comme dans celles d’Occident »(OR1).
Que ses paroles guident et inspirent les visiteurs de cette exposition !
Grandes Heures des manuscrits irakiens
Une collection dominicaine inconnue de manuscrits orientaux (XIIIe – XIXe siècle)
Couvent de la Minerve, Rome
L’Art Sacré 2 organise une exposition autour des manuscrits irakiens (XIIIe-XIXe siècle) d’une collection dominicaine, en partenariat avec le Centre culturel français à Rome (IFCSL).
Cet évènement fait suite à l’exposition aux Archives nationales (Paris) du 20 mai au 24 août 2015.
A partir du 9 juin 2017
Commissariat d’exposition : Jacques-Charles Gaffiot